Glyphosate : les pudeurs de gazelle d’une Europe en panne

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Symbole d’un embourbement politique typiquement européen, la reculade de la Commission sur le glyphosate démontre à nouveau comment la machine européenne est en panne.

Mercredi, l’Union Européenne a fait le choix de ne pas choisir. Alors qu’ils étaient appelés à trancher, une bonne fois pour toutes, sur le renouvellement ou non de l’autorisation de la molécule glyphosate, les pays européens ont à nouveau manqué de courage politique. Courage, c’est bien ce dont il s’agit, quand on sait que la controverse scientifique qui pèse sur la molécule la plus utilisée du monde est avant tout alimentée par un militantisme écologique qui ne dit pas son nom. Le bio, auréolé d’une nostalgie des temps lointains qui le place au-dessus de tous soupçons, en est d’ailleurs le fer de lance.

 

 

L’Europe dans l’enfer des lobbies environnementaux

Pour le quidam, il est difficile de comprendre sur le papier cette énième reculade de l’Europe, après deux ans de tergiversations. Alors quoi, les agences européennes indépendantes de tous les pays européens ont conclu à la non-dangerosité de la substance, dont l’ANSES française, et pourtant les pays de l’UE ne font pas confiance à leur jugement ?

 

Pour comprendre cette décision ubuesque, alimentée par les Etats européens eux mêmes, il faut remonter les vrais-faux scandales qui éclaboussent le glyphosate depuis son classement en 2015 en tant que cancérogène probable.

 

Il y a quelques semaines par exemple, il y a eu cette accusation de copier-coller grossière qui a pris d’assaut les médias et la toile. Monsanto aurait fourni une étude au BfR et à l’ECHA, que ces deux agences allemande et européenne auraient prétendument plagié. « Scandale ! » hurlent ici les politiques et les médias. « Collusion !» s’émouvra à l’envie M. Bourdin. Seulement voilà, la réponse du BfR, jamais publiée sinon dans les médias spécialisés comme Actu-Environnement, fait état d’une toute autre réalité.

 

Celle-ci a simplement suivi le protocole en publiant, pour des raisons de transparence, une partie de l’étude qui lui avait été soumise et en y apportant des précisions, en italique. Voilà ce qui hérisse les associations, la population, la (mauvaise) presse : un commentaire de texte érigé au rang de copier-coller par de mauvais journalistes.

 

Il y a eu également ce rapport en France de Générations futures qui a choisi de prouver la présence de glyphosate dans des résidus de céréales. Nos confrères d’Europe 1 ont cependant rapidement su désamorcer la bombe : au vu des doses trouvées par l’ONG, il faudrait consommer pas loin de 160 paquets par matin pour être inquiété par une éventuelle conséquence sur la santé.

 

 

Science contre ONG : comment une officine de l’OMS est devenue la source unique des médias français

Mais voilà, il est plus facile de s’indigner que de réfléchir.

Dans la bataille que livrent les ONG à la science, ces dernières utilisent toutes les munitions à leur disposition. Opportunément aidées dans leur combat par les conclusions du CIRC, le Centre international de recherche contre le cancer, les lobbies environnementaux alimentent l’idée d’un « conflit d’experts » et d’une « controverse » autour de la molécule.

Sauf qu’il n’en est rien : comme le rappelle très justement Gil Rivière-Wekstein, auteur de « Panique dans l’assiette » et invité de BFM TV, le CIRC est la seule agence au monde à avoir jugé que le glyphosate pouvait être cancérogène.

 

Et encore, cette même classification ne concerne pas les résidus présents dans l’alimentation ! Contrairement à ce que prétendent les ONG, l’étude du CIRC parue en 2015 ne concernait que les cas « de très forte exposition », nous rapporte Sciences et Avenir. En 2016, une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) avait jugé « peu probable » que le glyphosate soit cancérogène « chez les humains qui y seraient exposés par l’alimentation ». On est très loin du risque de cancer dénoncés par Générations Futures…

 

 

Générations futures, une ONG juge et partie?

En reprenant à leurs comptes les arguments du CIRC, par ailleurs questionné par la presse anglo-saxonne (Reuters, Politico) pour sa méthodologie peu transparente, les ONG veulent faire avancer leur propre agenda politique. C’est ainsi que la question du renouvellement du glyphosate, censé se jouer sur le seul terrain de la science, s’est désormais déplacée sur celui du cœur.

On comprend donc l’embarras sinon la lâcheté des pays européens qui entendent les arguments des scientifiques mais restent prisonniers de l’intérêt d’une population qui a soif de bio, sans savoir que ce dernier peut également regorger de pesticides tout aussi dangereux.

Mais les intérêts, qu’on se le dise, sont surtout économiques pour les lobbies du bio. En effet, une interdiction de l’Union Européenne se traduirait invariablement par une montée en puissance des produits issus de l’agriculture biologique.

Coïncidence : l’association Générations futures est présidée par une administratrice de Synabio, le plus grand syndicat de l’industrie bio qui comptent parmi ses partenaires financiers les cadors du secteur : Biocoop, Léa Nature, Botanic, Bjorg ou encore Bonneterre et Cie. De là à dire que l’interdiction du glyphosate, qui représenterait un gain financier exponentiel pour ces entreprises, motiverait les actions de Générations Futures, il n’y a qu’un pas que 24 Heures Actu ne saurait franchir…

 

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2 réactions à “Glyphosate : les pudeurs de gazelle d’une Europe en panne”

  1. Bonjour,

    Je vous invite cordialement à en boire un verre. Ainsi nous pourrons enfin trancher si oui ou non, cette molécule est dangereuse.

    Bien à vous,

    Un militant pour des alternatives saines.

    1. Bonjour,
      Pour répondre à votre remarque, sachez que l’expérience a été faite à plusieurs reprises. L’une d’elle, les plus connues, étant la suivante: https://www.youtube.com/watch?v=M8sgEhpHM4k
      Sinon, soyons sérieux: boire ou ne pas boire un verre de glyphosate ne fait pas office d’expérience scientifique. Notre rédaction sait trier le vrai du faux, et nombreuses sont les initiatives scientifiques qui ont conclu à la non-toxicité de la substance. Si vous ne nous lisez pas nous, lisez donc Sciences et avenir, que nous citons également dans cet article. Ou relisez l’avis de l’OMS sur la question, à nouveau.
      Cordialement,

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