Propagande macronienne : la presse régionale commence à se rebiffer

Grand manipulateur de médias qui ne demandent qu’à se prosterner aux pieds du plus fort, Emmanuel Macron sentirait-il le vent tourner un peu ? Pas si mal traité que cela malgré l’impasse politique et les casseroles qui s’accumulent à l’Elysée et dans les ministères, Macron voit son étoile pâlir avec la décisions de deux quotidiens régionaux de ne pas se prêter à une interview collective exigée par le président lui-même. A quelques jours des européennes, Macron bat le rappel des gueux de province, mais le charme et les grosses ficelles n’opèrent plus.  

La Voix du Nord et Le Télégramme seraient-ils les fers de lance du retour d’un journalisme traditionnel et respectable ? S’il est encore trop tôt pour donner une réponse, la fin de non recevoir envoyée à la face d’Emmnanuel Macron lundi dernier est plaisante à narrer. Inquiet de voir Loiseau aussi déplumée qu’un poulet passé sous les chenilles d’un char allemand en pleine Blitzkrieg, Emmnuel Macron a décidé de jouer la carte du président proche des provinciaux. Ces millions de Français n’ont pas le bon goût d’habiter les beaux quartiers de Paris… Ils représentent cependant tous une voix potentielle, alors au lieu de faire du porte à porte, Macron s’invite chez eux via la presse régionale quotidienne.

Une propagande qui ne passe plus partout

Oui, mais deux régions résistent enfin à l’omniprésence macronienne : le Nord et la Bretagne. Les journaux La Voix du Nord et Le Télégramme ont en effet refusé de se soumettre à la convocation de l’Elysée ce lundi. Les journalistes devaient venir expressément à Paris pour recueillir les éléments de langage imaginés par les équipes de communication du président. Et pour être sûr de ne pas dire des bêtises qui seraient regrettées après-coup, l’Elysée avait obtenu une relecture, c’est-à-dire le droit de modifier n’importe quel propos. Jouer à domicile et avec ses propres règles, rien de mieux pour poser l’avion pas très stable d’En Marche à quelques encablures des européennes.

Sauf que deux médias ne se sont pas pliés aux invectives du pouvoir et le rédacteur en chef de La Voix du Nord a précisé que son journal n’avait pas à servir la propagande élyséenne : « A cinq jours du scrutin, cela perturberait l’équilibre du traitement de la campagne auquel nous essayons de veiller et la publication est soumise à la relecture préalable de l’Elysée. Donc c’est sans nous ». Une décision saine et une justification qui l’est tout autant. Le Château n’a pu répondre qu’un laconique : « Le journal invoque un principe d’équité, nous le comprenons », mais cette décision passe mal alors que les appels désespérés à faire « barrage à la haine » se multiplient sur tous les plateaux télé et radio où logent bon nombre de membres du Gouvernement.

C’est la stupeur au sein de l’exécutif où l’on commence à imaginer une vie sans le soutien inconditionnel de médias biberonnés aux subventions publiques. Si les médias tournent le dos à la Macronie, l’édifice tombera en quelques semaines. Entre les vérités qu’il faut cacher (notamment dans l’affaire Benalla-Macron) et l’apparition crue du bilan catastrophique du pouvoir, il ne faudra que quelques manifestations pour donner le coup de grâce à un système à bout de souffle. Pas d’emballement, BFM TV et consort continuent à faire le sale boulot, mais il ne faudrait pas que la presse vienne à se rebiffer un peu trop. Elle pourrait alors retrouver un peu de crédibilité et pousser à la retraite un jeunot qui n’a pas eu le temps de cotiser toutes ses années.