
Le coup de com’ du président dans les Alpes n’a pas manqué de faire réagir. En affichant son soutien tant au nucléaire qu’aux énergies renouvelables, Emmanuel Macron entretient l’ambiguïté.
L’image a fait le tour des médias : Emmanuel Macron, sanglé dans une combinaison de ski rétro, contemplant la Mer de Glace, ce célèbre glacier alpin, fait de roches grises et de glace aux reflets bleutés. Glacier dont la fonte accélérée illustre sans doute mieux qu’aucune autre image la réalité du changement climatique, la Mer de Glace ayant reculé d’environ deux kilomètres depuis 1850. « Je n’imaginais pas une fonte aussi rapide, c’est impressionnant. On se rend compte comment les non-décisions ont fait en arriver là », s’est ému le chef de l’État.
Une autre ritournelle fait également, en cet hiver exceptionnellement doux, la Une de la presse française : les stations de ski tricolores sont à la peine. La faute, encore une fois, au réchauffement du climat, les pistes de montagne demeurant désespérément vierges de toute neige skiable. Si certaines stations, comme Montclar les 2 vallées, ont choisi d’y répondre par la manière forte, transportant par hélicoptère la neige des hauteurs sur leurs domaines, la plupart d’entre elles semblent se résoudre à tourner la page et privilégient le développement d’activités non dépendantes de l’enneigement, quand elles ne sont pas tout simplement contraintes de mettre la clé sous la porte et de vendre leurs téléskis.
Vanter le nucléaire et les énergies renouvelables : les limites du « en même temps » macronien
Conscient des enjeux, à la fois environnementaux et politiques, du réchauffement climatique, Emmanuel Macron n’a donc pas manqué l’occasion de soigner sa communication, en illustrant par son déplacement dans les Alpes son autoproclamé « virage écologique » — les municipales se rapprochant, en effet, à grands pas. Et le président de la République de se livrer, dans les pages du Dauphiné Libéré, à son désormais traditionnel « en même temps » : « nous devons fabriquer notre électricité de la manière la plus décarbonée possible. Nous avons une chance historique, c’est le nucléaire, qui est la production non intermittente la plus décarbonée au monde », a-t-il notamment déclaré.
Avant de rajouter : « Et notre défi, c’est de réduire le nucléaire pour augmenter la part du renouvelable ». Comprenne qui pourra : au cours d’un même entretien accordé à la presse régionale, Emmanuel Macron se livre ainsi à un éloge du bilan carbone de l’énergie nucléaire ; tout en appelant, simultanément, au développement des énergies renouvelables. Une contradiction dans les termes, qui ne peut s’expliquer que sous un angle politique, pour ne pas dire politicien : à quelques semaines d’élections municipales délicates pour la majorité présidentielle, le chef de l’État se doit de reconquérir les cœurs des électeurs écologistes. Quitte, semble-t-il, à dire et promettre tout et son contraire.
Des énergies renouvelables pas si vertes que ça
Car les énergies renouvelables, pour « vertes » qu’elles soient, ont aussi un coût carbone élevé. C’est particulièrement le cas de l’éolien, qui en France émet en analyses du cycle de vie (ACV) 11 gC02eq./kWh, contre seulement 6 g/kWh pour le nucléaire — sans même parler du désastre écologique que représente, en Chine, l’extraction des terres rares nécessaires à la fabrication des aimants composant les éoliennes. Quant à l’énergie photovoltaïque, ses émissions seraient comprises entre 40 et 50 g/kWh, soit près de dix fois plus élevées que celles du nucléaire.
En effet, si elles n’émettent pas de CO2 lorsqu’elles produisent de l’énergie, les renouvelables sont, sur l’ensemble de leur cycle de vie — et c’est bien là la seule valeur qui compte — loin de montrer la voie d’un monde bas carbone.
Enfin, il n’est pas inutile de rappeler que les énergies renouvelables sont, par définition, intermittentes. C’est-à-dire qu’elles ne produisent de l’électricité que lorsque le vent souffle, pour l’éolien, ou que le soleil rayonne, pour le photovoltaïque. Intermittence qui engendre deux problèmes majeurs : d’une part, celui du stockage de l’électricité, qui reste extrêmement coûteux et gourmand en métaux rares dont une poignée de pays a le monopole ; et d’autre part, celui du recours, nécessaire, aux énergies fossiles (charbon, fioul, gaz, etc.) lorsque le vent ou le soleil manquent. Ainsi, l’Allemagne, qui a renoncé au nucléaire, produit dix fois plus de gaz à effet de serre par kilowattheure que la France, quand elle compense les faiblesses de ses éoliennes par des centrales à charbon.
Est-ce vraiment le chemin que compte prendre Emmanuel Macron pour que la France retrouve un jour sa Mer de Glace ?