Le conflit commercial entre la Russie et l’Arabie Saoudite provoque une chute du prix du pétrole

Le prix du pétrole a largement chuté hier, à la suite du choix saoudien d’augmenter sa production et d’abaisser ses prix. Le prix du baril de pétrole a ainsi chuté de 25%. La décision a été prise par le prince héritier Mohammed ben Salmane, en représailles à la Russie, qui avait récemment refusé de diminuer sa production afin de maintenir le cours du prix du pétrole (la Russie se coordonne depuis trois ans sur l’OPEP afin de contribuer à maintenir les cours). Ce refus russe a donc été perçu comme une trahison par Ryad, qui souhaitait s’adapter à la baisse de la demande mondiale, suite à la propagation du coronavirus. Toutefois, la stratégie punitive saoudienne semble bancale, tant ses propres finances sont dépendantes du prix du pétrole.

La différence de vue entre l’Arabie Saoudite et la Russie, tous deux fortement dépendants du prix du pétole pour leur équilibre financier, réside dans le prix d’équilibre du baril : le prix d’équilibre pour Ryad se situe à 80 dollars le baril, tandis qu’il se situe à 45 dollars le baril pour Moscou. Cette différence engendre des stratégies qui peuvent se révéler en opposition. En outre, Moscou pourrait davantage résister que Ryad a la crise : elle dispose de 80 milliards de dollars de plus dans ses réserves financières que l’Arabie Saoudite, plus dépendante du pétrole.

Cet effondrement du baril n’avait plus eu lieu, à un tel niveau, depuis la guerre du Golf en 1990. L’onde de choc a entrainé une baisse de la plupart des bourses européennes (Londres, Paris, Madrid, Francfort). La bourse de Ryad a, quant à elle, baissé de 7,8% lundi. Selon des analystes de Goldman Sachs, le prix du baril pourrait même chuter jusqu’à 20 dollars au cours des prochaines semaines.

Cette guerre des prix a de même pour enjeu la présence croissante des Etats-Unis sur le marché des hydrocarbures, notamment en Europe. Les USA cherchent à prendre des parts de marché traditionnellement russes en Europe de l’Est et en Europe Centrale, à travers le projet des Trois Mers, qui vise à favoriser la mise en place d’une armature stratégique de défense face à la Russie. Ce projet comporte, notamment, un enjeu de diversification énergétique qui passerait, bien sûr, par le pétrole et le gaz de l’Oncle Sam. En réponse, la Russie cherche à maintenir des coûts bas du prix du baril afin de freiner la production des Etats-Unis : les techniques d’extraction américaines étant coûteuses, notamment pour le pétrole de schiste, des prix bas prolongés mettraient à mal le secteur américain.

La stratégie russe reposerait sur le conseil d’Igor Setchine, le patron de Rosneft, le deuxième plus grand producteur de pétrole russe. Selon ce dernier, la guerre des prix sera néfaste aux américains et, si elle ne perdure pas trop longtemps, bénéfique au secteur énergétique russe, qui pourra ainsi défendre sa place en Europe. En outre, les restrictions de production consenties avec l’OPEP freinaient les capacités d’investissement des sociétés pétrolifères russes, chose qui déplaisait fortement à leurs dirigeants.

Reste à savoir jusqu’où ira cette guerre des prix, et quelles seront les répercussions sur l’économie mondiale au cours des prochains mois.

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