
Par-delà les enjeux liés au virus lui-même, cette crise sanitaire est un révélateur très puissant des failles politiques, idéologiques et culturelles qui ont cours en France et en Europe.
La première faille (mais est-ce réellement une surprise) est révélée par les propos tenus par Agnès Buzyn, à propos de la gestion de la crise. Ministre des Solidarités et de la Santé, jusqu’aux élections municipales, où elle prend la tête de la liste de LREM, Buzyn a donné des révélations fracassantes quant à la manière dont le pouvoir a anticipé (ou non) le développement de la pandémie.
L’ancienne ministre a, ainsi, avoué qu’elle avait alerté Emmanuel Macron et Edouard Philippe dès janvier sur la dangerosité du coronavirus et les risques de propagation en France. Dans les pages du Monde, elle a ainsi déclaré : « Quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections n’auraient pas lieu. » Puis, parlant de la campagne électorale : « Depuis le début, je ne pensais qu’à une chose : au coronavirus. On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade. La dernière semaine a été un cauchemar. J’avais peur à chaque meeting. J’ai vécu cette campagne de manière dissociée. »
L’ancienne ministre continue :
« Je pense que j’ai vu la première ce qui se passait en Chine : le 20 décembre, un blog anglophone détaillait des pneumopathies étranges. J’ai alerté le directeur général de la santé. Le 11 janvier, j’ai envoyé un message au président sur la situation. Le 30 janvier, j’ai averti Edouard Philippe que les élections ne pourraient sans doute pas se tenir. Je rongeais mon frein. »
Agnès Buzyn déclare avoir alerté le gouvernement, alors même qu’elle déclarait, le 24 janvier : « le risque de propagation du coronavirus dans la population est très faible ». Deux explications peuvent être amenées : soit Buzyn tente de se dédouaner en reportant la faute sur le gouvernement, auquel cas elle aurait malgré tout joué un jeu trouble en acceptant de ne pas alerter l’opinion, et le gouvernement serait coupable de ne pas l’avoir entendu, soit elle minimise son propre manque d’anticipation.
Les réactions n’ont pas manqué de se faire entendre. Ainsi, Marine Le Pen déclarait : « Y a-t-il eu dissimulation de la véritable gravité de la situation aux Français ? Nous sommes peut-être à l’aube d’un scandale sanitaire majeur ». Jean-Luc Mélenchon ajoutait, quant à lui : « se rend[-elle] compte qu’elle engage sa responsabilité pénale et celle des autres personnes qu’elle dit avoir prévenues. » Cette déclaration n’est pas anodine : le code civil permet d’engager la responsabilité d’acteurs ayant entraîné la mort par négligence. Dans ce cas précis, il pourrait donc s’agir d’homicides involontaires.
Devant ces réactions, Agnès Buzyn a, par la suite, rétro-pédalé et déclaré qu’elle considérait que le gouvernement avait été pleinement à la hauteur pour affronter le virus… Un problème de prévenance du risque, ou, à minima, de cohérence et de cohésion au sein du gouvernement semble évident quant à la gestion de la crise.
En outre, l’Union Européenne est aussi en tort, et ceci par pure idéologie libertaire. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission Européenne, a avoué avoir sous-estimé l’impact de la maladie en Europe. Cette dernière n’a accepté de fermé les frontières de l’UE qu’hier, le 17 mars, alors que l’épidémie était déjà largement avancée et critique en Chine. Parlant de la fermeture de l’UE, elle déclare : « Nous avons compris que toutes ces mesures qui, il y a encore deux ou trois semaines paraissaient drastiques et draconiennes, devaient être prises à présent ». Mais ce qui semble « drastique » et « draconien » à ces mondialistes apôtres de l’ouverture totale n’est, en réalité, que du bon sens : protéger les populations européennes face à un virus potentiellement mortel. Que cela soit en matière de virus ou d’immigration, les dévots du libre-échange semblent avoir les mêmes difficultés à prendre les mesures qui s’imposent, tant ces dernières contredisent leur si chère idéologie.
Une fois la crise passée, il faudra en tirer des conséquences lucides : la politique-spectacle, dont Macron est l’incarnation et le plus fidèle héritier, pourra-t-elle continuer indéfiniment en France ? La mondialisation et le libre-échangisme, dont l’UE est devenue le pire des avatars, auront-ils encore les moyens de faire tant de mal aux Européens ? Les services publics continueront-ils à être dévastés par les politiques libérales, la ruine migratoire et le manque de vision à long terme ?