Au Brésil, la crise sanitaire devient une crise politique

Si l’Amérique Latine a pu paraître un temps épargné par le coronavirus, le Brésil est aujourd’hui sévèrement touché par la pandémie. A la fin mars, près de 30 personnes étaient mis en terre, chaque jour, dans la capitale du pays, São Paulo.

Fin février, la crise sanitaire paraissait encore avoir détourné son attention du pays, et du continent latin. Ce n’est que le 26 février que le premier individu réputé contaminé a été hospitalisé. Le premier décès a été enregistré, quant à lui, le 17 mars. Seulement 12 jours plus tard, ce sont 4 579 cas de contamination qui sont enregistrés, et 5 713 le 1er avril. Seulement 13 jours après le début de la pandémie, ce sont déjà 136 personnes qui sont décédées dans le pays.

L’impréparation du Brésil fut grande. Le 10 mars, le président brésilien, Bolsonaro, qualifiait encore la pandémie de « fantaisie » et, le 24 mars, évoquait des cas de « gripette ». Par la suite, le président brésilien avançait que la politique de confinement international constituait un « crime », et que l’essentiel consistait à maintenir à flot l’économie et l’emploi.

S’il a, par la suite, fait fermer les lignes aériennes entre le Brésil d’une part, et l’Europe et l’Asie d’autre part, les vols avec les Etats-Unis ont pourtant continué à être maintenus, et ceci malgré l’explosion de l’épidémie dans le pays.

Le 25 mars, 24 gouverneurs du pays (sur un total de 27) ont décidé de rompre avec les mesures nationales et d’appliquer les mesures sanitaires de l’OMS (le Brésil repose sur un modèle fédéral). En outre, plusieurs Etats brésiliens ont d’ores et déjà décidé de se confiner : c’est le cas de l’Etat de Rio de Janeiro, de São Paulo et de Rio Grande du Sud. Le ministre de la santé du Brésil s’oppose, quant à lui, directement aux mesures de la présidence, puisqu’il recommande de même d’appliquer les mesures de l’OMS dans le pays.

Un bras de fer semble émerger entre le gouvernement et le reste de l’administration du pays pour la gestion de la crise. Ainsi, le 27 mars, la justice fédérale brésilienne a annulé un décret présidentiel qui autorisait les églises à rester ouvertes durant l’épidémie. Le lendemain, la justice a interdit la diffusion d’une campagne publicitaire gouvernementale expliquant pourquoi le Brésil ne pouvait pas se permettre de se placer en quarantaine, et décriant l’action des gouverneurs de la Fédération. Enfin, une amende a été infligée au gouvernement pour une promenade de rue médiatisée, dans laquelle le président se déplaçait en public.

Selon El País, les représentants des forces armées du pays auraient tenu au moins deux réunions afin d’aborder la possibilité d’une éventuelle mise à l’écart de Bolsonaro. Le Général Hamilton Mourao étant présumé, si cela advenait, pour assurer le gouvernement par intérim.

Ainsi, la crise sanitaire qui touche le Brésil tend à cristalliser les oppositions et les tensions politiques internes au pays. Que cela soit au niveau international ou national, le coronavirus semble donc constituer un élément perturbateur propre à remodeler tous les équilibres politiques mis en place avant sa survenance.

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