Condé, Dalein Diallo : deux vainqueurs pour un fauteuil

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Dimanche 18 octobre, près de 5,5 millions de Guinéens se sont rendus aux urnes pour élire leur nouveau Président. La compétition se jouait principalement entre le Président sortant Alpha Condé et son principal rival, Cellou Dalein Diallo. Alors que la CENI dévoile au compte-goutte les résultats du scrutin dans un climat de violences, Alpha Condé devrait prochainement être déclaré vainqueur par l’instance officielle. Problème, Cellou Dalein Diallo estime que la CENI est inféodée au pouvoir et prête à falsifier les résultats pour faire réélire son rival. Il clame sa victoire avec 53% des suffrages.

Confiscation du pouvoir par Alpha Condé

Nouvelle semaine de violences meurtrières en Guinée. Et pour cause, le Président sortant ne souhaite pas lâcher son fauteuil… “L’armée de fraudeurs” que dénonce Cellou Dalein Diallo donne une large victoire à Alpha Condé. Mardi 20 octobre au soir, la CENI (Commission électorale nationale indépendante) annonçait que le RPG (parti présidentiel) récupérait quatre circonscriptions sur 38 (dont trois à Conakry et sa périphérie). Le lendemain, elle dévoilait les résultats de 16 nouvelles circonscriptions, octroyant à Alpha Condé la majorité absolue dans les deux tiers d’entre elles.

Un troisième mandat pour Alpha Condé ? Cellou Dalein Diallo ne l’entend pas de cette oreille. Rappelons que le Président sortant irait au-delà de la limite des deux quinquennats initialement prescrits. L’adoption d’une nouvelle Constitution le 7 avril dernier ne lui permet-elle pas de se présenter une nouvelle fois ? Si, à l’en croire, et même pour deux mandats supplémentaires s’il le souhaite.

Malgré l’article 2 alinéa 3 du Code électoral, qui stipule que “les cours et tribunaux veillent à la régularité des élections, règlent le contentieux électoral et prescrivent toutes mesures qu’ils jugent utiles au bon déroulement des élections”, Cellou Dalein Diallo n’a pas confiance en l’impartialité des institutions de son pays. Il fustige la CENI et la Cour constitutionnelle, qu’il juge inféodées aux autorités en place. Le président de l’UFDG demande la publication et l’affichage des résultats dans chaque bureau de vote, ainsi que la remise à chaque candidat d’un procès-verbal des résultats provisoires, des mesures électorales qui n’ont jusqu’alors pas été remplies par la CENI.

Les conditions de sécurité nécessaires au bon déroulement du scrutin ne sont pas non plus réunies. Bourrages d’urnes, trafic d’influence, incendies, insultes, barrages, obstruction des bureaux de vote à l’encontre des partisans de l’UFDG, perquisition et saisies de matériels… les mesures d’escroqueries du RGP seraient nombreuses. Et c’est sans compter sur la séquestration de Cellou Dalein Diallo mercredi 21 dans son propre domicile, par un fort déploiement policier.

Une seule solution pour que la victoire de Cellou Dalein Diallo soit enfin reconnue : court-circuiter le processus originel. Le leader de l’UFDG souhaite publier lui-même les résultats, après avoir récupéré l’ensemble des données du pays. Sans surprise, ce serait bien lui que les Guinéens auraient choisi pour succéder à l’autocrate octogénaire. Selon ses chiffres, obtenus par la compilation des procès-verbaux des bureaux de vote, dont les copies ont été transmises immédiatement par voie électronique à son QG par les délégués de l’UFDG, Cellou Dalein Diallo sort vainqueur de cette élection présidentielle, en remportant 53% des suffrages. Dès le lendemain du scrutin, le leader de l’UFDG lançait devant une foule de journalistes et de partisans en liesse : “Mes chers compatriotes, malgré les graves anomalies qui ont entaché le bon déroulement du scrutin du 18 octobre et au vu des résultats sortis des urnes, je sors victorieux de cette élection dès le premier tour”.

 

Cellou Dalein Diallo : “2020 n’est pas 2010. Encore moins 2015

 Les manifestations post-électorales des précédentes campagnes ont laissé un goût amer chez les Guinéens… Si en 2010 et 2015, Alpha Condé avait remporté la victoire (avec respectivement 52,5% et 57,9% des voix) avec une transparence électorale plus que contestable, cette fois-ci, Cellou Dalein Diallo ne compte pas se laisser faire. Il a affirmé sur son compte Twitter : “2020 n’est pas 2010. Encore moins 2015. NOUS SOMMES PRÊTS”. Le président de l’UFDG craint de se faire à nouveau voler la victoire et souhaite “tourner la page cauchemardesque de dix ans de mensonges”.

Les résultats du nouveau scrutin risquent fort de mettre le feu aux poudres. Depuis plusieurs semaines déjà, le RPG et ses partisans mènent de nombreuses actions violentes à l’encontre des opposants, entravant le bon déroulement de la campagne électorale et causant la mort de plusieurs personnes. L’escalade des violences s’accompagne de discours présidentiels haineux, incitant à la violence et au clivage communautaire. “Tout Malinké qui voterait pour un autre candidat que celui du RPG aura voté pour Cellou”, affirmait Alpha Condé en septembre dernier. Pour autant, l’article 55 du Code électoral stipule que “Tout candidat doit s’interdire toute attitude ou action, tout geste ou autre comportement injurieux, déshonorant, illégal ou immoral et doit veiller au bon déroulement de la campagne électorale”.

Si Alpha Condé remportait l’élection présidentielle, Cellou Dalein Diallo appellerait tous ses partisans à descendre dans la rue, pour revendiquer sa propre victoire et dénoncer des résultats faussés. Une action qu’il n’avait pas voulu entreprendre cinq et dix ans plus tôt, pour éviter des affrontements civils. Cette fois-ci, le message est clair : “J’invite tous mes compatriotes épris de paix et de justice à rester vigilants et mobilisés pour défendre cette victoire de la démocratie”, clame-t-il le lendemain du scrutin. Cellou Dalein Diallo parviendra-t-il à convaincre les instances internationales à réagir ? L’intervention de l’armée pour déloger l’actuel Président sera-t-elle nécessaire ? Tant que les résultats officiels n’ont pas été annoncés, il est difficile de se projeter. Quoiqu’il en soit, le leader de l’UFDG l’a promis : “La victoire sera à nous et nous saurons la conserver cette fois-ci”.

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