
Les « fake news » ont donné aux gouvernements et aux médias mainstream l’occasion de prendre le contrôle de l’information à un niveau jamais atteint dans les démocraties occidentales. Et pour ne pas changer, la France est en pointe sur le sujet.
Une tradition de censure
L’Eglise catholique avait au moins le mérite de la clarté en contrôlant les publications ; elle décernait, en guise d’autorisation, une mention telle que « imprimi potest, nihil obstat, ou autre imprimatur ».
Mais il n’y a rien de nouveau sous le soleil. La répression des fake news vient des États et des médias de masse, car les deux veulent garder la main sur l’opinion publique qu’ils craignent également. C’est le caractère horizontal et interactif d’Internet qui a profondément libéré l’émergence d’opinions hors de contrôle.
On observera que la chasse aux fake news intervient au fond tardivement par rapport à l ‘émergence d’Internet, lorsque précisément les pouvoirs sont remis en cause par cette opinion devenue décidément incontrôlable.
Les médias d’information sont maintenant envahis par des rubriques pratiquant le « news ou fast checking » : ici dix affirmations vérifiées en sorte de quizz, là un « spécialiste » répondant à une série de questions d’un journaliste. Ainsi Libération a carrément créé une publication en ligne dénommée « Checknews ». Et même l’AFP s’y met !
La prétendue bêtise populaire n’excuse pas la mainmise sur l’opinion
On nous explique que cette pratique des check-news est salutaire et nécessaire, face à la masse d’informations fausses et aux rumeurs les plus délirantes colportées sur le web.
Il est vrai qu’on a pu lire que l’armée russe était intervenue en Lombardie, et que des chercheurs fous auraient volontairement diffusé le Covid 19… Comme la vieille rumeur selon laquelle les Illuminati diffuseraient des produits chimiques à l’aides d’avions en haute altitude, les fameux « chemtrails »…
Une partie -mais minoritaire- de la population peu éduquée, est crédule, et des petits malins accumulent les vues sur Youtube à leur plus grand profit.
Mais le fond de la pensée de ceux qui passent en revue les informations pour en extirper les fake news et éradiquer les rumeurs est que la majorité des citoyens doivent être protégés et éduqués car ils seraient incapables de discerner le faux du vrai. Et qu’une bonne politique doit s’accompagner d’une pédagogie adéquate.
Car c’est une tradition bien ancrée dans l’élite française que de penser que le peuple serait incapable de comprendre les enjeux importants. Chaque fois que l’on manipule l’opinion, on nourrit en creux les germes de la future crise sociale ou sociétale.
La classe journalistique nous avait expliqué que son omerta sur l’existence de la fille cachée de François Mitterrand était légitime, car la vie privée du Président devait être protégée. Alors que ce fait symbolisait idéalement les dérives de ce président, déjà largement favorisé par un régime constitutionnel à la dérive monarchique caractérisée. En réalité, la presse d’alors était soumise au pouvoir dont on appris plus tard les turpitudes, ainsi l’espionnage téléphonique.
Il est par ailleurs cocasse de constater que les médias d’information se sentent obligés de développer des rubriques à la chasse aux fake news, alors même qu’ils prétendent donner la bonne information.
Cela n’est pas autre chose qu’une tentative de limiter l’émergence d’une opinion publique dissidente de celle qu’ils prétendent représenter fidèlement.
Les réseaux sociaux et toute la myriade de sites qui ont émergé ce dernières années libèrent la parole, comme si le Net était devenu une immense place publique, une agora spontanée à taille planétaire.
Un déficit démocratique
La montée des protestations qualifiées d’autant de populismes, ainsi nommés par les tenants de la bien-pensance, et la formidable puissance de cette opinion commune digitalisée, caractérisent, on le sait dans les pays démocratiques, le déficit croissant d’adhésion des citoyens.
Les médias détiennent aujourd’hui un pouvoir considérable dès lors que l’écran a remplacé massivement l’écrit ; nos hommes politiques occupent une partie substantielle de leur temps à la communication, qui selon eux doit expliquer leurs options politiques. Ainsi, quand une majorité perd le pouvoir en France, elle justifiera longuement que la désaffection de l’opinion et son échec électoral trouvent leur source dans un déficit de « pédagogie », aveu implicite du mépris dans lequel les hommes politiques tiennent leur peuple, supposé immature.
C’est toujours un mauvais calcul de parier sur l’ignorance du peuple. Emmanuel Macron peine à obtenir un soutien marqué de l’opinion alors que la situation de notre pays, saisi par la crise du Covid 19, devrait largement lui profiter. Opinion qui, tout les jours, s’aperçoit que les prises de positions et décisions de nos dirigeants sur l’épidémie arrivant de Chine se révèlent irresponsables à seulement quelques jours de recul.
Les Français n’ont pas oublié le quasi unanimisme des médias à l’approche du référendum sur la Constitution Européenne (traité de Rome II) qu’il ont rejetée. Ils n’ont pas non plus oublié que sa classe politique les a trahis quelques années plus tard en faisant adopter le Traité de Lisbonne sur cette constitution par le Congrès.
Le vide démocratique est occupé illégitimement par un néo-gauchisme qui sert finalement le pouvoir, gardien de l’ordre public.
Mais cette fois-ci, au plus profond de la crise sanitaire, après qu’on leur ait doctement expliqué que les masques chirurgicaux, le gel hydroalcoolique et le dépistage à grande échelle ne servaient pas à grand-chose, puis imposé masque et distanciation sociale, déconfinement raté et reconfinement, les Français n’oublieront certainement pas et prendront leur revanche, le moment venu.