Présidentielles 2022 – Macron ou Macron ?

Les pronostics sur les élections présidentielle de ce printemps se multiplient. D’une élection d’Emmanuel Macron dans un fauteuil offert par Marine Le Pen, on nous dit qu’une surprise est maintenant possible. On évoque même la possible élimination du président au premier tour, ce qui pourrait aboutir à l’élection de M.L.P si Valérie Pécresse ne le passait pas non plus. Il faut voir là une accélération d’un feuilleton électoral prêt à succéder à celui de la Covid. Mais que nous apprennent les récents sondages au cours de la Cinquième ? Et quelles sont les chances sérieuses de victoire de M.L.P ou d’Éric Zemmour ?

Des pronostics sondagiers incapables de nuance

À coup de sondages, la presse croit entretenir l’opinion. 1981 ; Giscard est donné large vainqueur au premier tour contre Mitterrand. Ils feront respectivement 25,85% et 28,32%. En 1995, Balladur était de loin le favori de droite pour les sondeurs. Mais le duel final retenu par les médias était Chirac – Jospin. En revanche les sondages donnaient majoritairement le classement suivant au premier tour ; Jospin 23,4%, Chirac 20%, Balladur 18,5%, J.M.L.P 15,7%. Le résultat fut 23,30% pour Jospin et 20,84% pour Chirac.

En 2002, la bataille annoncée au deuxième tour devait opposer Chirac à Jospin. J.M.L.P n’était alors jamais donné capable d’accéder au second tour selon tous les sondages. Sachant que les instituts de sondage « modèrent » systématiquement les résultats en fonction d’un comportement des sondés bien connu, selon l’idée qu’une partie de l’électorat FN/RN a une tendance à taire ses préférences pour ne pas être ostracisé. Phénomène probablement identique pour E.Z. C’est dire que les sondages doivent réussir à diagnostiquer plus que des intentions (est-ce possible ?), si les tendances ne sont pas clairement identifiées.

S’agissant du référendum sur l’Europe de 2005, le oui est très majoritaire de septembre 2004 à mars 2005 dans les sondages. Puis les intentions se retournent très nettement à partir d’avril en faveur du non. Les sondeurs ne se sont pas trompés cette fois-là. Mais on observera qu’à la faveur de ce scrutin, les médias ont quasi-unanimement soutenu le oui, laissant entendre que les opposants au référendum n’étaient pas autre chose que des ringards passéistes.

L’offre de 2022

Tous les sondages donnent Emmanuel Macron au deuxième tour, devançant largement ses adversaires au premier tour. Selon les derniers sondages, E.M obtiendrait 22,5% d’intentions de vote tandis que M.L.P, E.Z et V.P sont respectivement à 14,5, 14,5 et 14% (soit 43% pour la « droite »).

Les commentateurs s’accordent à dire, suivis par certains politiques, que seule  l’ « union des droites » pourra battre Emmanuel Macron au deuxième tour. Or M.L.P, E.Z et V.P n’offrent pas de possibilité d’union. Leurs désaccords, et ce, en dehors même de leur discours, sont majeurs. La fracturation de l’union des droites lors du deuxième tour semble inéluctable. D’autant que Macron fédère une partie substantielle de l’électorat de droite, majoritaire dans notre pays depuis des décennies.

On ne voit en effet pas comment battre Macron au premier tour autrement que dans la constitution d’un front de droite. L’idée serait d’avoir un leader comme V.P, mais  il est fou d’imaginer M.L.P et E.Z se retirer au profit de V.P. Pour autant, et c’est là que le bât blesse, il est tout aussi illusoire d’imaginer les perdants de droite au premier tour appeler à voter pour celui d’entre eux qui accédera au deuxième. D’autant que le duel au deuxième avec Macron tour aura comme effet de fracturer le vote de droite au profit de l’intéressé. 

Car si Macron s’est certainement aliéné l’électorat franchement populaire, celui de la « France d’en-bas », il ramassera sûrement les suffrages de larges franges de la droite et plus généralement des classes moyennes, désireuses de stabilité politique. Le phénomène en revanche risque ne ne pas se manifester efficacement si V.P lui est opposée.

L’arbitrage de la droite et le « cercle de la raison »

Dans tous les cas de figure, c’est donc bien la droite, qui correspond aux tendances lourdes de l’électorat, qui fera la différence en choisissant en son sein son vainqueur. Cette droite, majoritairement modérée pour ne pas dire bien-pensante, élira Macron s’il est opposé aux candidats tels que E.Z et M.L.P. Dans l’hypothèse d’un duel Macron/V.P, ce qui est de loin acquis à ce jour, sur quoi se fera la différence ?

C’est tout le problème de V.P qui représente une droite traditionnelle mal en point,  et qui n’arrive pas à nettement se différencier d’ E.M. Une partie du réservoir électoral de V.P est le même que celui d’E.M. V.P par ailleurs ne peut pas aller chercher l’électorat d’E.Z et de M.L.P. Elle perdrait alors la frange de l’électorat traditionnel du P.S qui pourrait voter pour elle par détestation d’E.M qui a « dérapé » à plusieurs reprises à la faveur de ses saillies élitistes.

Notre président, utilisant outrageusement les moyens de l’État dans le cadre de sa communication depuis plusieurs mois, alterne intelligemment les appels à droite et à gauche, à coup de promesses qui ne coûtent pas cher et de distribution de millions d’euros ici et là.

Comme l’assène régulièrement Alain Minc, l’électorat risque fort de porter au pouvoir ceux qui font partie du « cercle de la raison » ; ce pourquoi le résultat, que ce soit V.P ou E.M, sera bien Macron ou Macron. Avec cependant le risque qu’E. Macron, en cas de victoire, ne puisse se constituer une majorité parlementaire.

Autant dire qu’avec tant de configurations possibles, les sondages risquent fort de nous laisser dans le brouillard jusqu’à la fin.

 

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A propos de l'auteur Thierry Sautier

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